Association pour la protection et la mise en valeur de Calvisson et de la Vaunage
5 Février 2022
La Catalogne, la Provence, les Pays d'Oc en général sont unis par leur histoire, leurs affinités depuis des temps fort lointains.
La langue d'Oc est comme les autres langues latines une fille bâtarde du latin ! Fondées vers 500 ans av. J.C., Emporion (Empuries) et Rhodae (Rosas), colonies Phocéennes de Catalogne et de Grèce sont "filles" de Massalia (Marseille), établie quant à elle au VIème siècle av. J.C.
Ces colonies vont devenir les portes de la pénétration romaine en Provence, Narbonnaise et Tarraconaise, apportant aux provençaux et aux Catalans un trait commun, le latinisme.
Plus de deux siècles de vie commune sous la monarchie Wisigothique accentuent encore les rapports de voisinage et font naître un sentiment de solidarité, que conforte l'invasion musulmane.
Dès le Xème siècle, les Catalans et plus particulièrement les Comtes de Barcelone élargissent leur domaine avec pour point culminant l'union de la Provence et de la Catalogne, par le mariage de Douce de PROVENCE et Raymond BÉRENGER III de Barcelone (1112).
Les liens culturels se multiplient : l'esprit d'Oc prend son envol. Le langage poétique des troubadours languedociens fait école et influence très profondément les poètes Catalans.
Ces poètes parmi lesquels des femmes les" Trobairitz •. (telle dame 👉 Clara d'ANDUZA vers1200) chantent l'amour courtois, la nature, les conflits politiques ou guerriers ... La poésie des troubadours rayonne sur l'Europe entière. Elle suscite l'enthousiasme de Dante qui utilise pour la première fois semble-t-il l'expression " lingua d'oco (oui en occitan) par opposition à la langue d'oïl (oui en français).
C'est l'âge d'or de la littérature occitane ! Au même titre que le languedocien central, le gascon, auvergnat, le vivaro-alpin, le provençal est une variété de l’occitan !
La décadence politique de la Catalogne à partir du XVème siècle s'accompagne d'un déclin littéraire ; la langue Catalane se désagrège au profit du Castillan.
La Provence, récupérée par la famille d'ANJOU, est léguée en 1487 au royaume de France.
Dans le midi, la langue d'Oc perd sa prééminence au profit du « francien », dialecte parlé en Ile de France, et confirme l'emprise hégémonique de Paris. Cette dérive prend toute sa dimension avec les ordonnances de FRANÇOIS 1er ( Villers-Cotterêts 1539 ) qui imposent l'usage du « francien » dans tous les actes publics.
Le prestige de l'occitan décroît alors très rapidement : c'est le temps de la " lenga mespresada" (méprisée) et la pratique de l'occitan ne survit que dans les campagnes. Trois siècles vont passer.
Répondant aux mêmes impulsions, aux mêmes aspirations, la renaissance littéraire Provençale et Catalane s'instaure dans un semblable et parallèle cheminement dès le XVlllème siècle. Ce constat est pour les poètes des deux côtés des Pyrénées une véritable et fabuleuse révélation.
Cette résurgence de la littérature en langue d'Oc se concrétise par la Fondation du 👉 "Félibrige" en 1854 à l'initiative de J. Roumanille, Th. Aubanel, F. Mistral, A. Mathieu, A.Talvan, P. Gièra et J. Brunet.
D'après les historiens, le mot Félibre serait dérivé du bas latin "fellebris" qui signifie « nourrisson qui vit encore de lait ». Le félibre serait donc : « celui qui nourrit son inspiration du lait des muses ».
Le Félibrige désigne à la fois l'œuvre et l'association. Le Capoulié en est la haute autorité. Le Félibre est docteur de la loi, la pervenche est l'emblème du mouvement.
La langue occitane est issue d'une évolution du latin parlé, elle appartient à la famille des langues romanes comme le castillan, le catalan, le français, l'italien, le portugais, l’espagnol !
La tradition classe les parlers occitans en six dialectes : limousin, auvergnat, vivaro-alpin, gascon, languedocien, provençal.
L'objectif de Mistral tendait à rapprocher les uns des autres les dialectes méridionaux et portait sur le retour à la graphie classique de la langue d'oc : la parution d'une grammaire et plus tard d'un dictionnaire : « lou trésor dou félibrige » (1878) permettent d'apprécier la valeur de l'œuvre accomplie !
Dans les statuts du Félibrige modifiés en 1911 apparaît la définition de Nacioun Oucitano : « le félibrige est établi pour conserver à jamais à l'Occitanie sa langue, ses moeurs, ses coutumes, son art et tout ce qui constitue son caractère propre ».
La littérature Occitane s'enorgueillit jusqu'au XXlème siècle de ses grands auteurs et poètes parmi lesquels : P. Godolin, J.B. Fabre, T. Aubanel, J. d'Arbaud, M. Rouquette, R. Lafont, Y. Rouquette, R. Pecout...
L'œuvre du poète nîmois Antoine BIGOT (1825/1897) est constituée plus particulièrement de recueils de poésies : « Li boutoun dé gueto » 1855 et 1859 et « Li Bourgadieiros » dès 1862. Quatorze éditions (dont la dernière en 1908 est posthume) se composent de fables et pièces diverses (soixante-quinze pour ces dernières).
Cette œuvre est écrite en dialecte local, c'est à dire bel et bien en Langue d’Oc ; A. BIGOT se voulait le chantre du patois nîmois et refusait la « nomemklatura provençale » !
Frédéric MISTRAL l'avait invité à rejoindre le félibrige mais il se refusa toujours à perdre son indépendance.
Néanmoins il participa pendant plusieurs années à la rédaction de « 1'Armana provençau ». Le Félibre Roumieux déclara un jour: « Quel dommage de voir un poète d'une telle envergure se tenir par testardige (entêtement) à l'écart du Félibrige ».
Cet article paru dans La Lettre de nos Moulins a été rédigé par Henri Ayglon. Nous l'avons complété et agrémenté de photos
Sources :
- Le génie d'oc (Cahier du sud), Quand la Provence nous est contée (Marie Mauron),
- Terre des Troubadours (G. Zucchetto),
- Anthologie de la littérature occitane (Lafont Gardy),
- Perqué l'Occitan? (/EO), Collection des Amis de la langue d'Oc.
- Vida d'infant - ( Ed. de la Taurmagne).
- obre Lengadouciano (Ed. L Salle)
Article relu et corriger par L.C.L.