Association pour la protection et la mise en valeur de Calvisson et de la Vaunage
25 Mai 2022
Ce repas, c'est la fête que l'on fait la dernière gerbe rentrée. La coutume voulait que chaque mas offre un repas à la fin des travaux à tous les participants. La patronne a dressé la table du solstice d'été, fête du soleil à son zénith, recouverte d'un drap blanc, tout à côté de la dernière gerbe qui sent bon le grain et l'abondance. C'est pourquoi nous ne mettrons pas le blé sur la table, mais le pain qui est l'aliment par excellence.
Le pain au levain qui porte en lui les germes de la fermentation, donc d'une transformation, est une conquête de l'homme sur la nature. Dans la Bible il est le symbole de la survie du peuple d'Israël qui a été sauvé par la manne, pain venu du ciel. De là, vient que le pain doit être sanctifié avant d'être partagé.
A la table des moissons, c'est le père de famille, propriétaire ou contremaître qui présidait le repas, et qui signait le pain avant de le couper et de le distribuer. Certaines précautions étaient à respecter : ne pas le poser à l'envers ni gaspiller les miettes, à la fin du repas, l'envelopper dans un torchon propre, etc ...
De tout temps en Provence, seules les classes supérieures mangeaient du pain blanc. Le pain noir de seigle, ou le méteil (seigle et blé mélangés), ou même l'orge, était réservé aux travailleurs des champs aux goûts dits moins raffinés.
On comprend aisément que de tels travaux donnent soif. Le vin n'était pas forcément de la meilleure qualité, il était très souvent celui produit dans la propriété. L'important était qu'il soit servi en abondance. On déposera à côté de la cruche de vin, une carafe d'eau.
L'eau qui nous donne tant de soucis à l'aube du troisième millénaire, mérite un grand respect. Toute vie n'existe que parce qu'il y a de l'eau. Certaines eaux guérissent comme l'indiquent tous les cultes de sources. La piété populaire avait une prière spéciale pour l'eau. On la demandait à Dieu en cas de besoin, en reconnaissant que c'est seulement la sécheresse qui nous pousse à solliciter son indulgence. Et si l'eau ne vient pas assez vite, la pluie peut tarder en cette saison, il faudra porter le Saint Patron de la paroisse en procession.
Les femmes de Provence ont entendu tout au long de leur vie le proverbe qui dit que l'eau rend jolie. Une façon comme une autre de les persuader de ne pas boire du vin.
Les herbes de la Saint-Jean, il y en a qui sont consacrées à la lune et d'autres au soleil. Parmi les herbes consacrées à la lune nous avons la précieuse armoise appelée aussi artémise en souvenir d'Artémis, sœur d'Apollon et déesse de la lune. Elle guérit les maux d'yeux, l'épilepsie, les vers, préserve du venin des serpents. Dans la chaussure, elle fortifie la plante des pieds et rend infatigable.
La plus importante des plantes consacrées au soleil, la première de toutes, c'est le millepertuis qui est appelé aussi chasse-diable. Il est impératif d'avoir toujours chez soi du millepertuis non seulement pour chasser le diable, mais pour en faire une décoction dans l'huile d'olive, appelée "huile rouge", qui guérit les brûlures, y compris les coups de soleil. L'héliotrope, herbe des verrues, est, comme son nom l'indique, bonne contre les verrues.
La sauge sauve de toutes sortes de maux, les Chinois la préfèrent au thé, ce qui n'est pas peu dire. Cependant, si nous déposons sur la table le genêt d'Espagne, c'est seulement pour le décor et non pour ses capacités terrifiantes de faire passer de vie à trépas. En boire une tisane chaque soir, s'appelait le bouillon d'onze heures.
Le seul élément majeur qui manquerait sur cette table, si nous n'allumions pas une bougie c'est le feu, toujours en l'honneur de Saint Jean-Baptiste qui peut être comparé au feu purificateur. Il est le Saint le plus solaire et le plus brûlant du calendrier.