Association pour la protection et la mise en valeur de Calvisson et de la Vaunage
12 Janvier 2023
Le Temple de Diane n'est plus qu'une ruine entourée d'une épaisse et agréable frondaison qui prolonge et termine harmonieusement les massifs boisés de la colline de la Tour Magne.
Cette ruine ajoute un charme mystérieux à ce coin de Nîmes antique, car elle n'a jamais pu faire connaître exactement ce que fut le monument auquel elle a appartenu.
Comme la Tour Magne, le Temple de Diane garde un secret. Peut-être fut-il le temple de Némausus, celui de la divinité de la Source Sacrée, sur les bords même de laquelle il fut édifié. Proche de la Tour Magne, le sanctuaire était composé d’un triple portique monumental (dont on peut admirer une partie du fronton à l’entrée du Musée de la Romanité), d’un théâtre disparu, d’un nymphée et de cette construction énigmatique à flanc de colline. Passée l’entrée monumentale bordée de colonnades, autour d’une salle principale richement décorée, des couloirs latéraux inclinés permettaient d’accéder à l’étage en forme (probable) de terrasse à l’arrière de l’édifice.
L’ère chrétienne remplace peu à peu la romanité déclinante. Après les invasions, la société nîmoise se stabilise. Le « temple de Diane » en demeure un lieu névralgique associé aux affaires et au culte. En 991, il est transformé en abbaye : s’y installent les religieuses de Saint Sauveur de La Font, qui remanient un peu le bâtiment en y perçant des fenêtres. Elles prospèrent jusqu’au XVIe siècle grâce à leurs nombreux moulins. Puis, leur monastère est détruit en 1567 lors des guerres de Religion. Jacques Philippe Mareschal, à qui l’on doit l’actuel aménagement du premier niveau des jardins, a voulu conserver ce vestige pour créer une ambiance et ajouter à l’atmosphère antique du lieu. Bien qu’en ruine, ce qui deviendra « le temple de Diane » traverse ainsi les siècles jusqu’au nôtre, quasiment en l’état, inspirant au passage, peintres prestigieux et poètes romantiques, et suscitant de nombreuses interprétations quant à ses origines.
Du monument qui fut autrefois le Temple de Diane, temple sacré quelconque ou Maison de grand luxe, il ne nous reste guère que l'entrée principale qui donne accès à une « cella », un couloir latéral, des substructions diverses, véritable labyrinthe couvert par la végétation et quelques débris d'architecture parsemés dans la cella* .
Le Temple de Diane était précédé autrefois d'un grand porche formé de trois portiques, deux latéraux demi-circulaires sur leur plan et celui du milieu, de forme carrée, servant d'entrée au temple. L'entrée actuelle est à plein cintre et les pierres qui la composent ont souffert de l'incendie en 1576. Cette entrée donne accès à une salle rectangulaire, la cella, de 14m80 de longueur sur 9m55 de largeur, au fond de laquelle se trouve une grande niche carrée, pour statue, placée dans l'axe du temple et accompagnée de deux niches latérales.
Le mur de droite, en entrant, est orné de cinq niches pour statues, et il en était de même pour le mur de gauche, démoli. Celui de l'entrée, de deux niches, une de chaque côté de la porte. Toutes ces niches étaient accompagnées de pilastres d'ordre corinthien en marbre blanc, ornés d'arabesques. Elles portaient en outre, une corniche et un fronton, alternativement triangulaires, seulement en regard l'un de l'autre, chose assez bizarre.
La grande niche du fond du temple était décorée de quatre pilastres, couronnés d'un entablement particulier, soutenant deux plafonds superbes, l'un placé au-dessus des pilastres et l'autre au-dessus du renforcement de la grande niche.
* La cella est la partie close du temple étrusque puis du temple romain, généralement de forme rectangulaire, parfois ronde. Elle s’ouvre sur l’avant du temple par une porte à deux battants
Plan général du temple de Diane et de ses abords avec localisation des interventions -( gallica.bnf)
En réalité, ce mystère reste à éclaircir. On est à peu près sûr que cette partie importante du sanctuaire augustéen n’était pas un temple et que Diane, déesse de la chasse, n’y était pas vénérée. « Le fait qu’il soit de plan basilical et associé à d’autres salles annexes, invite à lui donner une autre destination », d’après l’historien nîmois Éric Teyssier dans « Nîmes la Romaine ». Était-ce une bibliothèque, comme le laissent supposer les nombreuses niches latérales de la salle principale ? Ces dernières auraient pu ainsi servir de rangements pour les manuscrits sur papyrus. Deux bibliothèques à Rome comportant des niches de même dimension donnent crédit à cette hypothèse. Compte tenu de sa configuration, cette cella * n’était à l’origine éclairée que par une petite ouverture au-dessus de sa porte d’entrée, ce qui devait en faire un lieu bien sombre, ambiance propice à la conservation des papyrus .
En revanche, la proximité des bains et de l’eau y est beaucoup moins favorable, ce qui pose question. Ce serait plutôt une salle dans laquelle les pèlerins venaient dormir pour qu’au matin, les oracles interprètent leurs songes inspirés par ce lieu sacré : une salle d’incubation similaire à d’autres identifiées dans l’empire romain. C’est ce que suggère une inscription, d’un certain Valérius Tatinus, retrouvée sur le site et dédiée aux Parques « en accomplissement d’un vœu d’après ordre reçu en songe ». Éric Teyssier avance que «les prêtres auraient intégré les pratiques de mantique et de médecine par incubation » à des pratiques rituelles plus anciennes sur le site.
Une histoire ancienne, relative à Nîmes, nous laisserait également imaginer un rôle autour de la Fertilité et de l‘Amour du temple de Diane.
Cette histoire raconte la vie d’une prêtresse du Temple de Diane, nommée Isis. De cette prêtresse on dit qu'elle découvrit une fontaine près du Vigan à laquelle elle donna son nom. Ce lieu était magnifique. Il était également désert, et lui plut tellement qu'elle y revint souvent se baigner. Un jour, un beau jeune homme du lieu, certains le décrivent comme un berger, la rencontra au bain. Bien qu'elle avait fait vœux de chasteté, la douceur du cadre aidant, elle se laissa séduire et conçut un fils. Elle réussit à cacher cette rencontre et le fruit de cet amour à tout le monde. Grâce à cela elle arriva à revenir voir son enfant et son amant très souvent. Par la suite, pour mieux faciliter ses voyages, elle institua une tradition selon laquelle les prêtresses consacrées au temple, devaient une fois par an durant la saison des fruit, venir se purifier à la chère fontaine du temple de Diane que l'on connait aujourd'hui. Bien sûr, elle était elle-même toujours là pour les accompagner, ce qui lui permettait de revoir ses deux amours : son fils, et son amant.
Encore une légende sur le fameux Temple du Jardin de la Fontaine. Mais malheureusement on ne conserve aucune des statues que devait protéger ce Temple. Et rien n’indique de manière sûre la fonction d’Isis à Nîmes.
Conçu en pierre locale de Barutel et du Bois de Lens, le monument présente des motifs et décors encore partiellement visibles, avec des mosaïques, des piliers ornés de chapiteaux. Les frontons de ces niches, qui alternent demi-cercles et triangles, ont inspiré l’architecture classique de la Renaissance, tout comme de nombreux édifices nîmois (Hôtel de Bernis, de la Poste, Chapelle des Jésuites…).
Sources :
Histoire des Antiquités de la ville de Nîmes par M. Ménard 1758.
Extraits de « Nîmes » par J. Igolin - 1938
gallica.bnf.com
Relecture Lysiane et Christian Letellier