Association pour la protection et la mise en valeur de Calvisson et de la Vaunage

APROMICAV CALVISSON

LA VAUNAGE, UNE TERRE D'ACCUEIL ET DE RÉSISTANCE

UN PASSÉ MÉCONNU DE LA DEUXIÈME GUERRE MONDIALE

Alors que nous avons commémoré les 80 ans de la Libération de la France, plusieurs lieux emblématiques de cette période de notre histoire ont été célébrés et honorés. Pourtant, certains épisodes restent méconnus et proches de notre lieu de vie . L’histoire de la Vaunage en fait partie. Marquée par ses racines protestantes et son histoire de tolérance, la Vaunage a joué un rôle essentiel dans l'accueil de personnes persécutées, particulièrement durant la Seconde Guerre mondiale.

Dès 1940, au cœur de l’occupation allemande, la Vaunage devient un refuge pour un grand nombre de personnes classées comme "indésirables" par le régime de Nazi. Parmi elles, des juifs, mais aussi des Autrichiens, des Allemands, des antifascistes, des antinazis, et des républicains espagnols, tous fuyant la persécution et la répression. La terre de la Vaunage, forte de son histoire de persécutions religieuses, se montre accueillante envers ceux qui cherchent à fuir les horreurs du régime nazi.

Certaines de ces personnes sont venues se cacher dans les villages de la Vaunage, aidées par des habitants courageux et des figures locales de la résistance. Parmi les exemples les plus notables, le pasteur Elie Bree à Clarensac et des familles comme les Boissier ou les Joseph ont risqué leur vie pour protéger des familles juives. En reconnaissance de leur courage, ces familles ont été honorées du titre de "Justes parmi les Nations" par le comité de Yad Vashem.

Tous les réfugiés en Vaunage n'ont pas connu le même destin. Certains, principalement des antifascistes autrichiens et allemands, ont été amenés dans le camp de prestataires de Langlade, un camp de travail ouvert en 1940 et qui a fermé ses portes vers 1942. Contrairement aux camps de concentration, le camp de Langlade n'était pas clôturé, et ses prestataires travaillaient pour les habitants locaux. Ces hommes, âgés de 16 à 55 ans, étaient souvent rejoints par leurs familles et vivaient dans des conditions précaires, logés dans des écuries ou des maisons abandonnées de la commune de Langlade.

 

Camp des Groupes de travailleurs étrangers 304 (GTE) de Langlade

Camp des Groupes de travailleurs étrangers 304 (GTE) de Langlade

Chaque matin, un appel était effectué avant que les prestataires ne soient envoyés à leur travail, principalement dans les champs et les vignes, mais aussi dans d'autres secteurs d’activité. Certains retrouvaient leurs anciennes professions, comme un boulanger qui aidait à Clarensac. D'autres travaillaient à la gare de Caveirac, déchargeant les wagons de marchandises, ou encore dans des ateliers de fabrication de sabots ou de savon.

L'un des aspects les plus marquants de cette histoire est la solidarité qui s'est développée entre les prestataires du camp et les habitants de la Vaunage. Un exemple éloquent est la création d'une savonnerie par les prestataires, qui a vu le jour grâce à l'aide des Vaunageols. En pleine période de pénurie, ces derniers ont autorisé les internés à cueillir les olives nécessaires à la fabrication du savon. Pour les habitants locaux, ce savon artisanal était une ressource précieuse en temps de guerre. De même, un atelier de fabrication de sabots a vu le jour à Calvisson, où des semelles en bois étaient produites, à une époque où il était difficile de trouver les matériaux nécessaire à la réfection des chaussures.

Malgré les difficultés, certains prestataires ont pu laisser des traces de leur passage en Vaunage. L’un d’eux, Ernst Elster, a écrit des lettres décrivant la vie quotidienne dans le camp. Robert Liebneck, quant à lui, a laissé des œuvres picturales qui témoignent de cette époque. Ces récits et ces créations nous offrent aujourd’hui un aperçu poignant de la vie dans le camp de Langlade et de la résilience des personnes qui y étaient internées.

Au fil du temps, les prestataires et leurs familles se sont progressivement organisés en Vaunage. Certains ont même obtenu l’autorisation de vivre à Calvisson et de cultiver leurs propres jardins. Leur quotidien, bien que rarement documenté, a été marqué par une volonté farouche de survivre et de préserver leur dignité, malgré les conditions difficiles.

Le témoignage d’Eva Edmands, qui vit aujourd’hui aux États-Unis, est l’un des rares à évoquer la vie dans le camp de Langlade. Enfant à l'époque, elle se souvient du camp et des difficultés auxquelles sa famille a dû faire face, mais aussi des moments de solidarité et d’humanité partagés avec les Vaunageols.

Certains de ces prestataires ont pu se cacher et survivre après la guerre. D’autres, ont eu, hélas moins de chance et se sont retrouvés internés dans les camps de transit de Rivesaltes ou des Milles avant de partir vers l’Est.

L’histoire de la Vaunage pendant la Seconde Guerre mondiale est un exemple frappant de la complexité des périodes de guerre, où se mêlent souffrance, résistance, et entraide. Si certains épisodes, comme l’aide apportée aux juifs par des habitants courageux, sont aujourd’hui reconnus et honorés, d’autres, tels que la vie des prestataires du camp de Langlade, restent encore dans l'ombre.

En cette période de commémoration, il est essentiel de se souvenir de ces moments où l’humanité a prévalu, même dans les heures les plus sombres. La Vaunage, terre de résistance et de solidarité, en est le parfait symbole, rappelant à tous que même dans l'adversité, des actes de courage et de bonté peuvent changer le cours de l’histoire.

                                                                                                             Stéphanie Froliger

Ce texte que nous publions nous a été aimablement confié par l'auteure Stéphanie Froliger que nous remercions chaleureusement ici.

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S
Il est toujours bon de se remémorer le passé, les épisodes difficiles de notre histoire afin de nous aider à comprendre le présent et mieux appréhender notre avenir commun. <br /> Un très bel article très documenté et un grand merci à Stéphanie Frolinger.
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